Dans un entretien exclusif au cours de l'émission Face-à-face de Top Congo de ce dimanche 7 juillet 2019, le Secrétaire général Augustin Kabuya de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), a expliqué les mutations profondes que traverse son parti, la mise en place du gouvernement Ilunkamba et l’exercice du pouvoir dans un contexte de coalition de son parti politique avec le Front Commun pour le Congo (FCC).

Au sujet de cette coalition, Augustin Kabuya regrette pour ceux qui pensent que faire la coalition avec le FCC est un crime. Ce n’est pas de cette manière-là qu’il faille présenter la chose. Quand vous regardez l’ancienne composition du Rassemblement (de l’opposition. Rassop), avant d’arriver à Lamuka, tous- ces gens-là étaient avec le président Joseph Kabila.

Quand ils sont venus vers nous au Rassemblement, on ne les avait pas rejetés. L’UDPS n'a jamais mené la politique de règlement de compte ni de chasse à l'homme. Quand ils avaient quitté Joseph Kabila et sont venus vers nous, ils avaient dit que c'est pour le bien-être de la population. Aujourd'hui, même avec le FCC, c'est ce qui nous met ensemble.

Le jour où nous allons constater que le FCC n'est pas dans cette logique, je ne pense même pas que je reviendrais parler ici. Il termine en disant que cette coalition est pour le bonheur du peuple congolais.

Top Congo : Vous n’avez pas encore intégré le fait que votre parti n'est plus dans l’opposition?

Augustin Kabuya : Je pense que tout membre de l’UDPS sait très bien que nous sommes un parti au pouvoir, et non un membre de l’opposition. En Afrique du Sud, quand l’ANC revendique et manifeste, cela veut dire qu'ils ne sont pas du pouvoir? Vous avez déjà vu des membres de l’UDPS manifester et revendiquer quelque chose? Non! S’il y a un mauvais comportement d’un individu, ou d’un groupe d’individus, pour toucher à un membre de l’UDPS qui est au sommet de l’Etat, la famille politique de ce dernier peut manifester pour désapprouver ce comportement.

Si les membres de l’UDPS constatent que quelque chose ne va pas, ils peuvent s'exprimer. Vous ne pouvez pas me demander à moi d’empêcher cela. C’est aussi cela la démocratie.

La base a fait sortir l’UDPS de l’Accord de Genève. Elle ne tolère plus la coalition FCC-CACH. Pourquoi l’UDPS n'écoute plus sa base?

Est-ce que vous avez mené des sondages pour savoir si toute la base de l’UDPS n'était pas d’accord avec notre coalition avec le FCC? Lors de l’Accord de Genève c'était toute la République et la base de l’UDPS qui étaient derrière sa position. Après la signature de cet Accord de Genève, je l'avais critiqué ici sur Top Congo et l'avais rejeté. Et c’est à partir de cette intervention que la Base avait compris, que même nos hauts cadres ne sont pas d'accord avec cet Accord de triste mémoire.

Aujourd'hui, la base a-t-elle compris que les hauts cadres de l’UDPS sont d’accord avec la coalition avec le FCC?

Il y a certaines réalités politiques qui peuvent faire en sorte qu’on soit dans une alliance avec telle ou telle personne. Nous avons gagné les élections présidentielles. Le FCC a une majorité au niveau du Parlement. Ce qui nous préoccupe dans tout ça, c’est le bien-être de la population. Vous le savez, notre message de campagne était « Le peuple d’abord ». L’Assemblée nationale est une représentation de notre population.

Tous ceux qui participent sont des élus de la population. Et ce sont ces élus-là qui doivent aider le chef de l'État pour réussir dans sa mission. Nous étions obligés de composer avec le FCC. Moi je ne vois pas de problème. Pourquoi la base ne comprend pas que parce majoritaire, le FCC devrait avoir la part du lion? Notre coalition n'existe pas pour servir nos intérêts. Notre coalition, c'est pour servir les intérêts de la population.

Si nous entrons dans cette logique-là, nous risquons de vivre ce que nous avons connu avant les élections. Ici, nous sommes dans un contexte. Il ne faut plus présenter les gens du FCC comme des gens qui veulent leurs propres intérêts, et non l’intérêt de la population. On est là ensemble pour travailler pour le bien-être de notre population.

Aujourd'hui le FCC est le meilleur partenaire possible de l'UDPS?

Je regrette pour ceux qui pensent que faire la coalition avec le FCC est un crime. Ce n'est pas de cette manière-là qu'il faille présenter la chose. Quand vous regardez l’ancienne composition du Rassemblement de l’opposition, Rassop, avant d'arriver à Lamuka, tous-ces gens-là étaient avec le président Joseph Kabila. Quand ils sont venus vers nous au Rassemblement, on ne les avait pas rejetés. L’UDPS n’a jamais mené la politique de règlement de compte et de chasse à l'homme.

Quand ils avaient quitté Joseph Kabila et sont venus vers nous, ils avaient dit que c'est pour le bien-être de la population. Aujourd'hui, même avec le FCC, c'est ce qui nous met ensemble. Le jour où nous allons constater que le FCC n'est pas dans cette logique, je ne pense même pas que je reviendrais parler ici.

Hier, l'UDPS reprochait au FCC de ne pas rechercher l'intérêt du peuple. Aujourd'hui, la situation a changé?

Nous sommes ensemble. Le gouvernement n'a même pas encore vu le jour. Mais vous commencez déjà à faire des reproches. Nous n'étions pas d’accord avec le PPRD et la Majorité présidentielle. Le FCC a vu le jour plus tard. Ils ont la majorité. Nous ne voulons pas faire la politique de Lumumba et Kasa-Vubu. Aujourd'hui, l’UDPS a gagné les élections présidentielles et le FCC a gagné les élections législatives. On doit réfléchir là-dessus, mettre nos intérêts de côté et voir ceux de notre peuple.

C'est ce qui est plus important. En 2007, le président de la République Félix Tshisekedi avait annoncé que si un jour, on devait composer avec le PPRD, on va oublier toutes les frustrations. Et aujourd’hui, nous avons regardé l'intérêt supérieur de notre peuple.

Aujourd'hui, certains opposants contestent les résultats des élections. Vous n'y voyez aucun inconvénient?

Si nous sommes sincères et honnêtes, on ne devrait même pas engager de débat autour des résultats que chacun de nous a obtenus au cours des élections présidentielles. Quand vous regardez les messages de compagne des uns et des autres, vous verrez que le candidat Ramazani Shadari n’a jamais été présenté par le président Joseph Kabila.

Pour Fayulu, les gens (Moïse Katumbi et Jean-Pierre Bemba) qui pouvaient le présenter devant le public, étaient en exil. Pour battre campagne, chez nous c'était la base. De l'autre côté, il y avait des gestionnaires de la République que la population contestait. Pour Fayulu, il y avait une contradiction totale avec ce qu'ils avaient annoncé.

La population a pris en compte tout cela. L’UDPS avait dit participer à l’élection avec ou sans machine à voter. Nos amis de Lamuka ont battu campagne contre cette machine. Ils ont démobilisé eux-mêmes leur électorat. L’UDPS s’est battu pendant 37 ans. Nous avons un bilan à donner. Le jour de la publication des résultats des élections, toute la République était en ébullition. Il y avait de la joie partout. Vous pensez que l'UDPS était derrière ces gens-là en les poussant à sortir de leur maison pour aller jubiler dehors? À la Cour constitutionnelle, nous étions sur le banc des accusés comme des faussaires. Il fallait que les amis apportent des preuves. Je suis très content et fier d’Étienne Tshiskedi pour le travail qu'il a accompli.

Et nous avons gagné. Ce que nous (UDPS) avons fait, aucun parti politique ne l’a jamais réalisé autant que nous. Quand nous avons perdu notre leader charismatique, beaucoup avaient parié sur la disparition de l’UDPS. Mais aujourd’hui, nous avons donné à l’UDPS un président et l’avons amené à la magistrature suprême. L’UDPS mérite beaucoup de respect par rapport à tout ce monde-là qui parle.

Si aujourd'hui Félix Tshisekedi démissionne ou est déchu de son pouvoir, que deviendra-t-il à l’UDPS?

C'est clair que le président de République n'est pas empêché définitivement. Il redeviendra à sa place comme ça doit être le cas pour un policier qui était affecté à la garde d’une entreprise qui tombe en faillite. C’est une organisation interne. Pour exister, je n’ai pas besoin d’être secrétaire général à l’UDPS. Je ne me suis pas battu pour l’être; mais pour le bien-être de notre peuple.

Le 1er février 2017, après la mort d’Étienne Tshisekedi, c'est Jean-Marc Kabund, qui était seul aux commandes comme secrétaire général, qui a convoqué le congrès de l’UDPS, où Monsieur Félix Tshisekedi est sorti président. À l’époque, les mêmes personnes avaient contesté le pouvoir de Kabund de convoquer le congrès. Et aujourd’hui, elles veulent nous donner des leçons et sont même devenues plus catholiques que le Pape. Qu'on ne vous trompe pas, les statuts sont respectés.

A quand le gouvernement que tout le monde attend?

Le gouvernement va sortir bientôt. La Belgique avait fait combien de mois, d’années sans avoir de gouvernement? Avez-vous appris un problème au sujet de la personne devant former le gouvernement ? Aujourd’hui, tout le monde sait que la RDC a un président qui s’appelle Félix Tshisekedi, il y a un Premier ministre Ilunga Ilunkamba.

Dans quelques jours, le gouvernement sera mis en place. Je vous ai donné les exemples de la Belgique et de la Hollande pour dire que nous ne sommes pas pressés. Il y a des prophètes de malheurs qui pensent que la coalition FCC et CACH n'est pas utile. Nous nous disons que cette coalition est pour le bonheur du peuple congolais. Mais c'est une priorité pour nous, car nous sommes préoccupés par la sortie du gouvernement. Nous sommes conscients et préoccupés par rapport au temps.

JMNK/L’Avenir


(ROL/TH/GW/Yes)