La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni ont exhorté, lundi 7 décembre, l'Iran à ne pas mettre en œuvre de nouvelles mesures visant à accélérer ses activités nucléaires, afin de préserver un "espace pour la diplomatie".

Dans une déclaration commune diffusée par le Quai d'Orsay, les trois pays européens signataires de l'accord sur le nucléaire iranien de 2015 (JCPoA) déplorent ainsi l’annonce par l’Iran de son intention d’installer trois nouvelles cascades de centrifugeuses avancées dans l'usine d'enrichissement de Natanz", qu'ils jugent "contraire au JCPoA et profondément préoccupante".

Selon les termes de l'accord sur le nucléaire iranien que Paris, Berlin et Londres s'efforcent de préserver malgré sa dénonciation par les États-Unis, l'Iran n'est pas autorisé à utiliser des centrifugeuses aussi perfectionnées.

Les signaux positifs de Biden

Dans ce communiqué conjoint, les Européens appellent Téhéran à ne pas "mettre en péril l'importante opportunité de revenir à la diplomatie que représente l'arrivée de la nouvelle administration américaine" sous la présidence de Joe Biden, qui a exprimé sa volonté de réintégrer les États-Unis à l'accord de Vienne. 

Le président américain Donald Trump avait sorti son pays de l'accord de Vienne en mai 2018, avant de rétablir des sanctions ayant plongé la République islamique dans une violente récession. En riposte, Téhéran s'est désengagé à partir de mai 2019 de la plupart de ses engagements clef pris à Vienne. Depuis l'annonce de la victoire de Joe Biden à la présidentielle du 3 novembre, le président iranien Hassan Rohani multiplie les signaux d'ouverture à l'attention du prochain gouvernement américain. Le président américain élu a dit sa volonté de réintégrer les États-Unis à l'accord de Vienne, mais la voie qu'il propose est jugée inacceptable par le gouvernement iranien.

Les porte-paroles des ministères des Affaires étrangères français, allemand et britannique expriment en outre leur "vive préoccupation" après l'adoption par le Parlement iranien d'une loi controversée sur la question nucléaire qui, "si elle est mise en œuvre, se traduira par un développement important du programme d'enrichissement de l'Iran et par une capacité d'accès réduite de l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique)".

Selon les médias iraniens, le texte enjoint le gouvernement à prendre immédiatement des dispositions pour produire et stocker au "moins 120 kilogrammes par an d'uranium enrichi à 20 %" et l'appelle à "mettre fin" aux inspections de l'AIEA. Toutefois, pour être promulguée, cette loi doit encore être signée par Hassan Rohani, qui s'y est dit opposé.

"Si l'Iran souhaite sérieusement préserver un espace pour la diplomatie, il ne doit pas mettre en œuvre ces mesures", concluent les trois pays européens, en soulignant qu'"un retour au JCPoA aurait également des bénéfices pour l'Iran".

Téhéran traite par le mépris les exigences de Ryad

Dans le même temps, Téhéran a traité par le mépris lundi l'exigence formulée par les Saoudiens d'être "consultés" avant toute éventuelle négociation entre les États-Unis et l'Iran à propos du programme nucléaire iranien. "S'attarder trop longtemps sur le cas d'un pays médiocre de cette région n'apporte rien", a déclaré Saïd Khatibzadeh, porte-parole des Affaires étrangères iraniennes lors d'une conférence de presse en ligne.

"Chacun est libre de parler, mais eux feraient mieux de ne pas parler de ce qui ne les regarde pas afin de ne pas se mettre dans une position embarrassante", a ajouté M. Khatibzadeh, pressé de réagir à des propos tenus samedi par le prince Fayçal ben Farhan Al-Saoud, ministre des Affaires étrangères saoudien. "Ce que nous attendons avant tout, c'est que nous soyons pleinement consultés dans ce qui se passe au sujet des négociations avec l'Iran", avait-il déclaré en marge d'une conférence sur la sécurité organisée à Bahreïn.

Rivaux à l'échelle régionale, la République islamique d'Iran, chiite, et le royaume sunnite d'Arabie saoudite ont rompu leurs relations diplomatiques en 2016 et s'accusent mutuellement de déstabiliser le Moyen-Orient.

Gisèle Mbuyi


(GM/TN/Yes)