Cette partie de la RDC est troublée actuellement par les rebelles du M23 soutenus par Kigali depuis leur résurgence en 2022. Au cours de sa rencontre avec son homologue angolais, Joao Lourenço, mardi 27 février 2024, à Luanda, capitale angolaise, le président congolais, Félix-Antoine Tshisekedi avait accepté de rencontrer le président du Rwanda, Paul Kagame. C'est ce qu'avait rapporté à la presse le ministre angolais des Affaires étrangères, Tete Antonio. Le dirigeant rwandais a également donné son accord de principe pour une telle rencontre. Il revient maintenant à la médiation de travailler pour la matérialisation de cette rencontre, avait précisé le patron de la diplomatie angolaise dont le pays a été désigné par l’Union africaine comme médiateur dans le conflit qui oppose les deux voisins.

Depuis la reprise des hostilités entre les rebelles du Mouvement du 23 mars (M23) et les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), le Rwanda est accusé d’alimenter cette rébellion d’obédience tutsie. Kinshasa  accuse également Kigali de mener une guerre économique en pillant les richesses minières de la République démocratique du Congo en utilisant des alibis notamment comme celui de la présence au Congo des Rwandais des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR). « L’accusation [de pillage] n’est pas nouvelle mais elle est de plus en plus audible. », fait remarquer Jean-Baptiste Placca, chroniqueur politique à RFI (Radio France Internationale). Dans cette guerre de l’AFDL de Laurent-Désiré Kabila pour chasser du pouvoir un dictateur, le maréchal Mobutu, dont le sort n’apitoyait plus personne, « les amis rwandais et ougandais avaient découvert un pays au sous-sol bien appétissant et il en a résulté une gloutonnerie qui n’aurait jamais cessé depuis », explique ce chroniqueur de 71 ans.

Dialogue des sourds…

Alors que les Etats-Unis, la France, la Belgique et d’autres pays de la communauté internationale préconisaient le dialogue, Félix Tshisekedi, lui, privilégiait une solution militaire après avoir constaté avec lassitude le « cercle vicieux » des dialogues engagés dans le passé avec des rebellions ascendantes du M23, à savoir le RCD d’Azarias Ruberwa Maniwa et le CNDP de Laurent Nkundabatware  Mihigo. Toutes ces rébellions ont été parrainées par le Rwanda de Paul Kagame.

Après huit années de sommeil, le M23 s’est brusquement réveillé en novembre 2021, mettant en déroute les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC). Les tentatives de controffensive n’ont, jusqu’ici, pas abouti. Et depuis près de deux mois, le M23 accentue sa pression militaire sur la capitale régionale du Nord-Kivu, Goma. Cela, malgré l’envoi de renforts des troupes de la SADC et du Burundi. Mais un verrou quasiment infranchissable a été placé dans la cité rempart de Sake par l’armée congolaise et ses soutiens.

Durant deux mois, le M23 a multiplié des assauts contre ce verrou mais sans succès. La rébellion a décidé de se tourner vers le nord en renflant des localités moins protégées comme Rwindi ou Vitshumbi où ils sont entrés sans combattre. A l’international, plusieurs Etats et organisations appellent le président de la République, Félix Tshisekedi, à dialoguer avec le Rwanda. Les Etats-Unis, la France, la Grande Bretagne ont estimé que cette crise sécuritaire ne peut être résolue par les armes. Une approche diplomatique est meilleure. Mais ce dialogue risque d’être celui des sourds dès lors que les deux parties n’acceptent pas d’avancer. Kigali campe toujours sur ses positons, accusant Kinshasa de soutenir les rebelles rwandais des FDLR. Un préalable devrait être rempli par Kigali avant cette rencontre au sommet. Washington a appelé récemment le Rwanda à cesser son soutien au M23 et à retirer ses troupes de la RDC, chose que le régime de Paul Kagame a refusé de faire. Pourtant, c’est une condition posée également par Kinshasa pour entamer tout dialogue. Si les lignes ne bougent pas, les deux parties risquent de ne pas s’entendre.

Tshisekedi veut une paix définitive

A ce jour, les multiples dénonciations que fait le président Félix Tshisekedi autour de cette énième « agression » rwandaise créent une forme de nivellement de connaissance auprès de plusieurs Congolais au sujet de cette affaire qui dure depuis 30 ans. Félix Tshisekedi cherche à obtenir une paix définitive et non celle de circonstance. « On sent chez Félix Tshisekedi le désir secret de faire l’unité de son peuple contre ses prédateurs dont lui n’a aucunement peur. Il veut montrer que son peuple n’est plus aussi vulnérable qu’autrefois. Ce que Paul Kagame interprète comme des intentions belliqueuses. », relate Jean-Baptiste Placca.

Les Congolais ne sont plus prêts à observer – médusés –le festin du Rwanda sur leur sol avec ce cortège de morts dans l’indifférence totale de la communauté internationale.  C’est ce qui justifie la bataille de Tshisekedi pour la levée de l’embargo sur les armes qui pesait sur un pays pourtant menacé par des divers conflits. Félix Tshisekedi a aussi augmenté de 300% le budget destiné à l’armée en le faisant grimper jusqu’à plus d’un milliard de dollars américains. Un éveil national qui, visiblement, inquiète le Rwanda.

Dido Nsapu