La tension monte au point que neuf personnes ont été arrêtées pour avoir répandu des « fake news » sur les réseaux sociaux. Leur crime: avoir partagé un article fictif qui faisait état de 600 000 bulletins nuls comptabilisés au profit de la junte et du limogeage de deux membres de la Commission électorale.

Ces personnes arrêtées disent avoir juste partagé le contenu et ne pas avoir eu conscience de la fausseté des informations. Ils risquent aujourd’hui cinq ans de prison en vertu de la très controversée Loi sur le Crime Informatique, largement utilisée dans le passé pour réduire au silence les opposants politiques.

Résultats et chiffres incohérents

Ces informations sont fausses et révélatrices d’une inquiétude montante de la population sur la validité des élections, mais finalement pas si loin de la réalité, puisque ce sont près de deux millions de bulletins de vote qui ont été invalidés au moment du décompte. Quant aux membres de la Commission électorale, ils sont sous le feu des critiques pour avoir géré ces élections avec une «rare incompétence» selon plusieurs observateurs. Un réseau d’inspecteurs internationaux a parlé d’un procédé de vote « extrêmement problématique » et de résultats « follement inexacts ». Près de 200 plaintes ont été déposées...

Visiblement paniqués le soir du vote, les membres de la Commission électorale ont refusé de donner les résultats du décompte final, pendant quatre jours. Finalement jeudi, des résultats ont été publiés, mais ils ont vite été montrés du doigt comme complètement incohérents: le nombre de votants ne correspondait pas dans plusieurs circonscriptions, le taux de participation, annoncé à 66% le soir du vote est passé à 74% sans explication. Sous la pression, la Commission électorale a retiré ces chiffres de son site internet et a déclaré que plusieurs incohérences devraient être tirées au clair. Les résultats définitifs ne seront annoncés finalement que le 9 mai, après un événement majeur pour le pays: le couronnement du nouveau Roi de Thaïlande.

Les sénateurs, atouts des militaires

Pour l’instant, en l’absence de résultats officiels, c’est donc le bras de fer entre les anciens militaires au pouvoir et l’opposition. Cette dernière semble avoir remporté le plus de sièges, alors que les militaires affirment avoir gagné le vote populaire, à 500 000 voix près. Mercredi, le principal parti d’opposition s’est présenté devant les médias avec une coalition de partis qui s’annoncent pro-démocratique. Avec 256 sièges, ils représentent la majorité au Parlement. Mais cela ne suffira peut-être pas, puisque pendant leurs 5 ans passés au pouvoir, les militaires ont modifié la Constitution, pour s’attribuer le droit de nommer les 250 sénateurs.

Ces derniers participent aussi au vote de validation du Premier ministre. La Thaïlande semble donc engluée une fois de plus dans une crise politique dont elle ne parvient pas à sortir depuis plusieurs décennies. Pour l’instant, tous les partis appellent leurs partisans au calme mais certains observateurs craignent une montée de violence si un consensus n’est pas rapidement atteint.

RFI


(Yes)