Comme le couperet d’une guillotine, un familier qui nous quittait, emportant avec lui, comme chaque défunt, les secrets imprenables de son jardin de vie, le pourquoi et le comment d’une existence pas comme les autres mais y ressemblant beaucoup.

Emus par cette disparition, le président du Conseil Supérieur du Portefeuille de l’Etat, Maurice Mbayo, coordonnateur honoraire des intellectuels catholiques, s’est dit très profondément attristé par la disparition du révérend père Léon de Saint Moulin, S.J, décédé à Kinshasa le jeudi 24 octobre dernier.

Face à ce vide, Maurice Mbayo a demandé à tous les Congolais en général, et les intellectuels en particulier, de réserver des obsèques méritées à l’illustre disparu.

« Nous demandons sûrement que des obsèques dignes lui soient réservées. Lorsque vous prenez le cursus, il a passé toute sa vie dans ce pays, il a rendu d’énormes services et s’il a eu à créer des liens, il a créé davantage dans ce pays qu’ailleurs. Donc, c’est de notre devoir d’être à l’écoute bien sûr de sa congrégation et de notre diocèse pour que l’on réserve à ce père de l’église des obsèques dignes. »

Plus Congolais que rien du tout

En effet, pour Maurice Mbayo, l’illustre disparu est plus Congolais que l’on ne le pense pour avoir fait de la RDC sa seconde patrie, à laquelle il est resté attaché jusqu’à son dernier souffle. Il a aussi souligné que ce prêtre Jésuite fut un intellectuel très engagé, qui aimait la commission des intellectuels catholiques, invité ou pas, il se présentait et prenait part utile aux travaux et aux débats. Il fut pour lui un vrai connaisseur du Congo Kinshasa et un vrai Kinois.

Comme historien qui a pris à cœur son domaine de connaissance, il suffisait de lui dire de quel coin du Congo l’on était originaire et il vous racontait tout sur vos origines : "Licencié en philosophie, licencié en théologie et lorsqu’on devient Docteur en histoire, vous comprenez qu’il a cette facilité d’aller dans les moindres détails dans l’histoire de notre pays et l’histoire, il la connaissait. Que ce soit l’histoire géophysique comme l’histoire politique. Nous avons vu l’action qu’il a menée notamment pour aider à l’organisation des différentes élections qui se sont déroulées dans notre pays."

Attachement a la commission des intellectuels

Le coordonnateur honoraire de la commission des intellectuels catholiques, Maurice Mbayo, garde des souvenirs assez interpellateurs de ce grand esprit que les intellectuels doivent immortaliser :

« Son attachement à la commission des intellectuels catholiques nous l’avons senti lors du décès du père Mubengayi, qui est l’un de nos premiers aumôniers. Il était très attristé par sa disparition et il était venu témoigner de la vivacité que manifestait le père Mubengayi par rapport à la commission des intellectuels catholiques. Le père aimait la commission des intellectuels qu’il a accompagné à sa manière, à travers la messe dominicale de 11 heures à la paroisse St Joseph de Matonge, tout le monde sait avec quelle manière il conduisait la chorale Quasimodo, avec quelle emphase et cela était une touche qui lui était très particulière, parce que nous éprouvons du plaisir à le voir battre le rythme dans cette chorale. »

Le président Maurice Mbayo reconnait à ce pasteur un homme simple, convivial, qui était attaché aux valeurs non seulement de son sacerdoce mais aussi des connaissances acquises parce que les travaux du père Léon de Saint Moulin comme ses cartographies sont des mines d’or.

Appel aux intellectuels

Le responsable honoraire de la commission des intellectuels catholiques lance un appel vibrant à l’endroit des intellectuels de réserver des hommages mérités à cet intellectuel de première heure de la vie politique et sociale de la RDC. Il demande aussi aux intellectuels de relayer le père de Saint Moulin dans la mesure du possible à travers les œuvres qu’il a initié dont le CEPAS qui est un grand centre d’édition qui a eu à éditer la revue Congo-Afrique (Ex. Zaire-Afrique) d’une manière régulière :

« Je ne pense pas qu’il y ait deux revues dans ce pays qui ait connu une telle régularité. Le Père Léon de Saint Moulin s’occupait aussi du Service d’Education Spéciale où il essayait au niveau de l’archidiocèse de Kinshasa d’encadrer les jeunes désœuvrés. C’est une action que nous aimerions aussi que l’on perpétue en sa mémoire. Donc, nous intellectuels catholiques, par rapport à ceux avec qui il a travaillé que ce soit à CEPAS ou au Service d’Education Spéciale, nous aimerions que les intellectuels l’honorent et la meilleure manière de l’honorer c’est de ne fut ce que de maintenir la qualité du service qu’étaient rendus par ces institutions »

A la question de savoir si le Père Léon de Saint Moulin n’est pas parti avec une mémoire chargée de chagrin au vu de la responsabilité politique des intellectuels catholiques quant à la précarité du peuple congolais qu’il souhaitait voir épanoui de son vivant, Maurice Mbayo, a reconnu que le Père a joué sa part et l’a bien joué en rappelant dans ses prêches la responsabilité de chacun dans sa société comme chrétiens et intellectuels, il a réveillé les consciences :

«Il ne manquait pas d’interpeller les congolais. Peut- il partir avec un sentiment d’insatisfaction ? Je ne crois pas que ça soit ainsi. Moi je voudrai que s’il lui était demandé de faire son propre bilan, qu’il soit fier de son bilan. Il a écrit, il a sensibilisé jusqu’au dernier jour de sa vie. Que son âme repose en paix. Il a combattu le bon combat. A nous intellectuels, par rapport à la question que vous soulevez, nous devons continuer à être interpellés, nous devons rechercher les valeurs qui doivent nous permettre de résoudre, tant soit peu, les questions qui nous talonnent : la pauvreté exécrable, les mœurs critiquables.

C’est du travail qui doit être fait, tant soit peu, et que tous nous savons que ce n’est pas à un tour des mains que cela doit être fait mais ceux qui ont la charge, la conscience de sensibiliser notamment à travers notre commission des intellectuels. Nous n’allons pas nous fatiguer, à travers des thèmes à retenir lors de la semaine des intellectuels et autres.

Il faudrait bien que l’on sache revenir sur tous ces aspects des choses parce que nous pouvons contribuer à la résorption de la pauvreté. Aux peuples congolais, nous disons qu’ils doivent sérieusement regrettés le décès du R.P Léon de Saint Moulin. Je vous ai dit qu’il est plus congolais que le congolais lui-même et alors, lorsqu’il est parti nous devons être interpellé pour essayer de voir à quelle mesure être sous ses traces, par notre échelle de valeur, arriver quand même à résoudre nos problèmes. »

Le Révérend Père Léon de Saint Moulin de la compagnie de Jésus est décédé le jeudi 25 octobre dernier à l’âge de 87 ans à Kinshasa où il a passé tout son ministère et sa vie après son ordination le 06 Août 1964 après son entrée dans la compagnie des jésuites le 14 septembre 14 septembre 1950. D’origine belge, il est né le 17 décembre 1932 à Naast (Soignies).

R.O.L.


(ROL/PKF)