Le projet de construction d'une route reliant les deux capitales, les plus rapprochées du monde, fait la Une de l'actualité ces derniers temps, entrainant ainsi un débat entre les pro et les alter sur les réseaux sociaux. Des congolais sont ainsi divisés sur la faisabilité de ce projet, que la plupart qualifie d'inopportune.

Pour certains analystes avertis, ce projet est économiquement inutile pour la République démocratique du Congo, parce que le grand profit serait tiré de l'autre côté du Fleuve. Un flux important des marchandises à destination de la RDC échapperait aux ports maritimes du Kongo central. Car les importateurs auront plus de bénéfice en déchargeant leurs marchandises par Pointe noire - qui offre un tarif douanier avantageux- pour les acheminer à Kinshasa, via cette route.

La RDC ne disposant pas, jusqu'à présent d'un port en eau profonde pour permettre l'accostage de navires de charge, verra toute sa cargaison déchargée à Pointe noire, avant d'atteindre facilement et sans beaucoup de peines la capitale congolaise par ladite route. L'actuel schéma Europe ou Asie-Pointe-Kongo central, via Pointe Noire appartiendra désormais au passé.

Alors que le président de la République, Félix Antoine Tshisekedi, s'est lancé sur le terrain de la mobilisation des capitaux, à l'interne comme à l'international, pour renflouer les caisses de l'Etat et actionner à une vitesse exponentielle le processus de modernisation de la RDC, ce projet passe, aux yeux de nombreux observateurs, comme une action politique, mieux cosmétique ne contribuant qu'à l'embellissement du Fleuve Congo, entre les deux villes.

Ce qui n'est pas du tout une priorité pour la RDC car, au stade actuel, poursuivent-ils, le pays doit viser des infrastructures rentables en lieu et place des œuvres architecturales purement esthétiques.

Les ports maritimes de Matadi, Boma et Banana en danger

Deuxième pourvoyeuse des recettes fiscales et budgétaires, après l'ex. Katanga, il y a plus de deux ans, la province du Kongo central est aujourd'hui le premier poumon économique du pays, après l'éclatement de la province cuprifère, grâce aux recettes générées au niveau des ports internationaux de Matadi, Boma et Banana. Le projet de la route reliant Kinshasa à Brazzaville, dont les travaux de construction démarrent en août 2020, risquent de compromettre non seulement l'avenir de cette province, mais par ricochet, paralyser l'économie de tout le pays.

Face à une certaine opinion qui estime que l'Etat congolais doit surseoir momentanément ce projet, d'aucuns proposent des solutions pour prévenir ce danger qui guette le pays et faire profiter ce projet à la RDC au même titre que son voisin d'en face.

A en croire ces analystes, cela doit nécessairement passer par l'accélération des travaux de construction du port en eaux profondes de Banana, dont les travaux ont été lancés début 2018, d'une part, pour que les importations à destination de la RDC ne transitent plus par Pointe- Noire. D'autre part, le nouvel Exécutif doit penser à revoir à la baisse ses tarifs douaniers, qui ne reflètent plus la réalité de nouveaux paradigmes du marché économique mondial.

Et au-delà de tout ca, quel avenir pour les sociétés étatiques comme la SCTP, l'OCC, la DGDA et tous ses autres services qui opèrent et tirent leurs ressources et autres prélèvements des importations et exportations au niveau de ces ports maritimes? Ce sont des milliers d'emplois qui risqueraient d'être supprimés, au moment où la résorbation du chômage figure parmi les priorités des priorités.

Bref des défis énormes restent à relever en amont pour donner du crédit à ce projet auprès d'une partie de la population encore sceptique. C'est après avoir réalisé ces défis, croient dur comme fer, ces mêmes observateurs, que la route Kinshasa-Brazzaville pourra servir de commune mesure les deux capitales les plus proches du monde, en assurant la fluidité des échanges commerciaux, mais aussi la circulation rapide et sécurisée des personnes et de leurs biens.

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(ROL/TH/Yes)